MUSIQUE : "FLIP" RETOURNE LE RAP GAME

Après l'avoir vu rapper sur les toits de Paris avec ses potes, il débarque enfin dans la cour des grands. Sous ses airs d'homme perturbé, Antoine Valentinelli ou Lomepal se dévoile encore plus décalé dans son album Flip et sa réédition, sortie le 1er décembre dernier.


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Il avait déjà fait part de son originalité à travers plusieurs EP, mais c'est avec ce premier album solo qu'il confirme sa singularité, en mixant rap technique et chanté. Ce n'est pas pour autant que le jeune parisien n'est pas accompagné, puisque l'album contient aussi quelques duos explosifs, tel que Billet, en featuring avec le belge Romeo Elvis.

Parce que oui, Lomepal, c'est avant tout le genre de rappeur qui touche à tout : selon lui, se limiter au rap serait comme s'imposer des limites. C'est la raison pour laquelle on peut facilement l'entendre chanter dans l'album. Et sans même s'irriter les cordes vocales. Il est plutôt doué en fait.

Dans l'album deluxe, il accentue son excentricité en nous faisant cadeau de trois titres inédits : Outsider, Un peu de sang et Club. Cette nouvelle sortie a permis à l'artiste de d'atteindre les 50 000 ventes et ainsi de décrocher son premier disque d'or. Au top.

La pochette est la même que l'album original, mis à part le fond rose qui devient holographique. Lomepal a fait appel à Rægular, qui avait réalisé la couverture du dernier album de Nekfeu, Cyborg. On y voit le rappeur transformé en femme, avec un air mélancolique qui, on peut le dire, vient aussi bien illustrer le contenu de l'album que son titre. Mais pas seulement.


"Flip" désigne aussi une célèbre figure de skate, une activité  très importante pour Lomepal qui parcourt le monde à la recherche des meilleurs spots pour exercer sa passion.


C'est ce que le rappeur parisien du 13ème arrondissement raconte dans son interview disponible dans le livret de la réédition, totalement consacrée à son rapport avec le skate. Il déclare : "avant, c'était (le skate) même ma principale raison de bouger, on parcourait la France, soit en fraudant le train à plein, soit en voiture à six dans la Clio : classique".
Lomepal raconte aussi ses expériences à Barcelone et en Australie en tant que skater, une facette du rappeur qui ressort beaucoup dans son album. Il en dédie un son, Bryan Herman, en référence au skater californien qu'il affectionne particulièrement. Il se considère skater avant rappeur : "jamais un vrai skater n'avait été aussi fort en rap". C'est en ajoutant des bruits de skate au début du premier morceau de l'album, Palpal, que le rappeur nous introduit son univers. L'interlude Skit Skate y fait aussi écho, séparant l'album en deux parties.


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Mais "flip", c'est avant tout la traduction de "retournement" en anglais.

Ce nouvel album, c'est un flip constant. On passe de sons mélancoliques à de gros bordels musicaux mais toujours aussi propres, tel que Pommade. Dans Palpal, le rappeur se décrit comme "un mec bien et un connard dans le même corps". Encore une fois, on passe d'un extrême à l'autre. C'est là que l'on comprend le sens du mot flip : tout est une question de retournement et de changement. L'artiste se transforme en femme sur la pochette de l'album, mais on remarque aussi le passage d'un homme déchiré en amour à un autre révolté contre la société. Dans Club, il se considère comme un "génie bloqué dans le club jusqu'à la fin des temps". Lomepal fait la critique d'une société qui pousse sa génération en ruinée à vivre au-dessus de ses moyens. Flip, c'est avant tout un hymne à une jeunesse blasée et fauchée, mais qui trouve le moyen de se débrouiller avec peu, comme il le dit dans Billet : "même pauvre j'étais bien habillé".



Dans cet album, on fait la rencontre d'un Lomepal sincère et passioné, mais surtout vulnérable. Bref, une vulnérabilité assumée qui se ressent à l'écoute de ce nouveau projet, depuis que le rappeur a décidé de ne plus s'imposer aucune limite.

Dans Flip, on assiste à la création d'un univers singulier dans lequel Lomepal nous plonge. On fait alors la connaissance de deux personnages totalement décalés et opposés, tout deux sous le nom de "Pal" : un Pal arrogant et égocentrique, et un autre beaucoup plus humble et vulnérable, qui dans le fond, se trouve être une bonne personne. C'est à peu près de cette façon que le rappeur semble répartir les musiques de son album : il passe d'un personnage à l'autre en fonction des morceaux. Allant d'humour noir à regrets amoureux, les deux alter ego du rappeur se partagent l'album et les paroles. On fait surtout leur connaissance dans Palpal : on le savait déjà, Lomepal a un ego surdimensionné, et ce son clippé le confirme en mettant en scène une expérience de Milgram.



Parce qu'en effet, Flip est avant tout une réponse à la solitude, à l'égocentrisme, aux drogues et à l'alcool, mais aussi à l'amour.

On retrouve un Lomepal torturé sentimentalement parlant dans Yeux disent, ou encore des regrets amoureux dans Bécane. La musique porte constamment préjudice à ses relations avec les femmes, c'est ce dont il témoigne majoritairement dans ces deux morceaux.



Flip, c'est avant tout un projet qui est plus que propre selon moi. Tout est très technique et réfléchi, mais l'album présente aussi et bien évidemment le genre de son à mettre en fin de soirée. Plein d'ambiances différentes se mélangent et peuvent se fit à tout sorte de moment. Avion, c'est le genre de son que tu lances en fin de ressoi. "L'avion se crash, ferme les yeux, profite de la descente"... Propre. On a aussi des sons sur lesquels chiller entre potes, tels que 70 ou une de mes préférées, Ray Liotta, avec des phrases qui te restent en tête toute la fucking journée. Des sons plus spéciaux tel que Danse, son étonnant duo avec le groupe de Camélia Jordana, où une sorte de métaphore du sexe est mise en avant. Mais bientôt ça me fait plus d'effet.




Je pourrais encore parler de cet album pendant des heures. Malheureusement, je ne peux pas tout traiter, l'article est déjà assez long.

Ce qui est à retenir, c'est que si vous ne l'avez pas encore écouté, foncez. Nous sommes le 31 janvier 2018, et certains morceaux sont encore dans ma playlist d'aujourd'hui. J'ai été touchée par l'album décomplexé qu'est Flip qui fait bel et bien parti de mes albums préférés. C'est varié, bien écrit, par un rappeur qui ose faire ce qu'il veut. Je peux parier avec vous que vous vous retrouverez dans au moins un morceau, et je vous confie mon top 5 de mes sons préférés de l'album.




Mon top 5 de Flip Deluxe :


5 - Sur le sol

J'ouvre ce top 5 avec un son plutôt autobiographique dont je n'ai pas vraiment parlé dans cet article. Sur ce morceau, on retrouve un Lomepal plus sincère et mélancolique qui se confie sur son enfance et le relationnel compliqué qu'il a vécu avec sa mère. J'ai été touchée par la qualité des paroles, par le rythme du morceau (surtout le début du son lors du premier couplet) mais aussi par le fait que c'est la seule fois où Lomepal nous parle d'un sujet aussi personnel que celui de la famille. La sensibilité du rappeur se fait ressentir, encore plus dans l'unique live où il reprend ce morceau lors d'un freestyle sur la radio Skyrock (cliquez). Lomepal pose Sur le sol en outro et nous laisse nous couper du monde pendant tout le morceau. 

4 - Bécane

Avec cette dixième piste, Lomepal aborde le sujet des femmes en nous racontant les regrets d'une ancienne histoire d'amour. J'ai aussi bien adoré le refrain chanté que les paroles et l'instru qui me coupent du monde à chaque fois que je l'écoute. La prod est de Superpoze, un jeune beatmaker originaire de Caen qui a composé de nombreuses instrus envoutantes pour les morceaux les plus perso de l'album. La version acoustique disponible sur l'album deluxe est d'autant plus prenante.

3 - Lucy

Que dire de ce son, à part que la technique est au rendez-vous. J'ai rien à ajouter, à part que ce son prend aux tripes. Ah si, le duo 2Fingz composé de Doums et Nepal se joint à notre rappeur pour un pass-pass plus que chaud bouillant qui pourrait facilement placer ce morceau encore plus haut dans le top.

2 - Outsider

A chaque fois que j'écoute ce son, je comprends pas pourquoi Lomepal avait décidé de ne pas l'inclure dans l'album original. Puis je le remercie de l'avoir rajouté dans la réédition. C'est sur une instru assez simple mais envoutante sur laquelle l'auteur parle de son mal-être inné : au-dessus des autres, il veut constamment se surpasser. 

1 - Yeux disent

Un choix tout à fait personnel, c'est avec ce morceau que j'ai découvert l'album. Une instru  simple mais qui transporte, des paroles sincères qui traitent d'un tourment quotidien : choisir entre les femmes et la musique. La version acoustique disponible dans la réédition est d'autant plus envoutante. Oui, j'utilise beaucoup ce mot mais ça me correspond bien.


Lomepal continue aujourd'hui de défendre son disque : actuellement en tournée dans toute la France avec son "Flip tour", il se produira à Paris, La Cigale, le 22/03 et à l'Olympia le 04/10. Je serai présente à l'Olympia mais d'ici là, n'oubliez pas de saigner l'album comme jamais. Get ready for it. Ayant été membre du public à Paris lors de son tour des skateshops en septembre dernier, je vous assure que ça sera le feu.



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Laura Vieira Alves

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